Anthony de Mello
Le chemin de l'amour : Méditations pour la vie
Qu'est-ce que l'amour ? Regardez une rose. Est-il possible que la rose dise : "J'offrirai mon parfum aux bonnes personnes et je le refuserai aux mauvaises ? Ou bien imaginez-vous une lampe qui refuse ses rayons à une personne méchante qui cherche à marcher dans sa lumière ? Elle ne pourrait le faire qu'en cessant d'être une lampe. Et observez comment un arbre donne son ombre à tout le monde, aux bons comme aux mauvais, aux jeunes comme aux vieux, aux hauts comme aux bas, aux animaux comme aux humains et à toutes les créatures vivantes, même à celui qui cherche à l'abattre. Telle est donc la première qualité de l'amour : son caractère indiscriminé. C'est pourquoi nous sommes exhortés à ressembler à Dieu, "qui fait briller son soleil sur les bons et les méchants et tomber sa pluie sur les saints et les pécheurs ; vous devez donc être tout en bonté comme votre Père céleste est tout en bonté". Contemplez avec étonnement la bonté de la rose, de la lampe, de l'arbre, car vous avez là une image de ce qu'est l'amour. Comment peut-on atteindre cette qualité d'amour ? Tout ce que vous ferez ne fera que le rendre forcé, cultivé et donc faux, car l'amour ne peut être forcé. Il n'y a rien à faire. Mais il y a quelque chose que vous pouvez laisser tomber. Observez le merveilleux changement qui s'opère en vous dès que vous cessez de voir les gens comme des bons et des mauvais, des saints et des pécheurs, et que vous commencez à les voir comme des inconscients et des ignorants. Vous devez abandonner votre fausse croyance selon laquelle les gens peuvent pécher en pleine conscience. Personne ne peut pécher à la lumière de la conscience. Le péché se produit, non pas, comme nous le pensons à tort, par méchanceté, mais par ignorance. "Père, pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu'ils font. Voir cela, c'est acquérir la qualité d'indifférence que l'on admire tant dans la rose, la lampe et l'arbre. Et voici une deuxième qualité de l'amour : sa gratuité. Comme l'arbre, la rose, la lampe, il donne et ne demande rien en retour. Nous méprisons l'homme qui choisit sa femme non pas en fonction de ses qualités, mais en fonction de la somme d'argent qu'elle apportera en dot. Un tel homme, disons-nous à juste titre, n'aime pas la femme mais l'avantage financier qu'elle lui apporte. Mais votre propre amour est-il différent lorsque vous recherchez la compagnie de ceux qui vous apportent une satisfaction émotionnelle et que vous évitez ceux qui ne le font pas ; lorsque vous êtes positivement disposé à l'égard des personnes qui vous donnent ce que vous voulez et répondent à vos attentes et que vous êtes négatif ou indifférent à l'égard de celles qui ne le font pas ? Là aussi, il n'y a qu'une chose à faire pour acquérir cette qualité de gratuité qui caractérise l'amour. Vous pouvez ouvrir les yeux et voir. Le simple fait de voir, d'exposer votre soi-disant amour pour ce qu'il est réellement, un camouflage de l'égoïsme et de la cupidité, est un grand pas vers l'obtention de cette deuxième qualité de l'amour. La troisième qualité de l'amour est son absence de conscience de soi. L'amour aime tellement aimer qu'il est béatement inconscient de lui-même. C'est comme si la lampe était occupée à briller sans se demander si elle profite ou non aux autres. La façon dont une rose répand son parfum simplement parce qu'elle ne peut rien faire d'autre, qu'il y ait quelqu'un pour en profiter ou non. La façon dont l'arbre offre son ombre. La lumière, le parfum et l'ombre ne sont pas produits à l'approche de personnes et éteints lorsqu'il n'y a personne. Ces choses, comme l'amour, existent indépendamment des personnes. L'amour est simplement, il n'a pas d'objet. Elles sont simplement, indépendamment du fait que quelqu'un en bénéficiera ou non. Elles n'ont donc aucune conscience d'un quelconque mérite ou de faire le bien. La main gauche n'a pas conscience de ce que fait la main droite. "Seigneur, quand t'avons-nous vu avoir faim ou soif et t'avons-nous aidé ? La dernière qualité de l'amour est sa liberté. Dès que la coercition, le contrôle ou le conflit entrent en jeu, l'amour meurt. Pensez que la rose, l'arbre, la lampe vous laissent complètement libres. L'arbre ne fera aucun effort pour vous attirer dans son ombre si vous êtes en danger d'insolation. La lampe ne vous imposera pas sa lumière de peur que vous ne trébuchiez dans l'obscurité. Pensez un instant à toute la coercition et au contrôle auxquels vous vous soumettez de la part des autres lorsque vous vous efforcez de répondre à leurs attentes afin d'obtenir leur amour et leur approbation ou parce que vous craignez de les perdre. Chaque fois que vous vous soumettez à ce contrôle et à cette coercition, vous détruisez la capacité d'aimer qui est votre nature même, car vous ne pouvez que faire aux autres ce que vous permettez aux autres de vous faire. Contemplez donc tous les contrôles et toutes les contraintes qui existent dans votre vie et, avec un peu de chance, cette seule contemplation les fera tomber. Dès qu'ils tomberont, la liberté apparaîtra. Et la liberté n'est qu'un autre mot pour désigner l'amour.
(…)
La symphonie de la vie avance, mais vous regardez toujours en arrière, vous vous accrochez à quelques mesures de la mélodie, vous bouchant les oreilles au reste de la musique, produisant ainsi une disharmonie et un conflit entre ce que la vie vous offre et ce à quoi vous vous accrochez. Viennent alors la tension et l'anxiété qui sont la mort même de l'amour et de la liberté joyeuse que l'amour apporte. Car l'amour et la liberté ne se trouvent que lorsque l'on apprécie chaque note au fur et à mesure qu'elle se présente, puis qu'on la laisse partir, afin d'être pleinement réceptif aux notes qui suivent.
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