Matthieu Ricard
Le bonheur : Un guide pour développer la compétence la plus importante de la vie
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Nous devons faire la distinction entre l'affliction et la souffrance. Nous subissons la souffrance mais nous créons le malheur. Le mot sanskrit dukkha, opposé à sukha, ne définit pas simplement une sensation désagréable, mais reflète plutôt une vulnérabilité fondamentale à la souffrance et à la douleur qui peut finalement conduire à la lassitude du monde, le sentiment que la vie ne vaut pas la peine d'être vécue parce qu'il n'y a pas moyen d'y trouver un sens. Sartre a mis ces mots nauséabonds dans la bouche du héros de son livre La Nausée :
"Si quelqu'un m'avait demandé ce que signifie être en vie, j'aurais répondu en toute bonne foi que cela ne signifie rien, qu'il s'agit simplement d'un vaisseau vide.... Nous n'étions tous qu'un amas de vies maladroites, embarrassées par nous-mêmes. Nous n'avions pas la moindre raison d'être là, aucun d'entre nous. Chaque être vivant, confus, vaguement anxieux, se sentait superflu... .1 était superflu lui aussi... .1 avait la vague idée de se supprimer, pour débarrasser le monde d'au moins une de ces vies superflues."
La conviction que le monde se porterait mieux sans nous est une cause fréquente de suicide.
La souffrance peut être déclenchée par de nombreuses causes sur lesquelles nous avons parfois un certain pouvoir, parfois aucun. Naître avec un handicap, tomber malade, perdre un être cher, être pris dans une guerre ou une catastrophe naturelle, tout cela est indépendant de notre volonté. Le malheur est tout à fait différent, puisqu'il s'agit de la manière dont nous vivons notre souffrance. Le malheur peut certes être associé à la douleur physique ou morale infligée par les conditions extérieures, mais il n'y est pas essentiellement lié.
Une étude menée auprès de tétraplégiques a révélé que, bien que la plupart d'entre eux aient reconnu avoir d'abord pensé au suicide, un an après avoir été paralysés, seuls 10 % considéraient leur vie comme misérable ; la plupart estimaient que la leur était bonne.- De même que c'est l'esprit qui traduit la souffrance en malheur, il est de la responsabilité de l'esprit de maîtriser sa perception de celle-ci. Un changement, même minime, dans la manière dont nous gérons nos pensées et dont nous percevons et interprétons le monde peut changer notre existence de manière significative. Changer la façon dont nous vivons les émotions passagères conduit à un changement d'humeur et à une transformation durable de notre façon d'être. Une telle "thérapie" cible les souffrances qui affligent la plupart d'entre nous et cherche à promouvoir l'épanouissement optimal de l'être humain.
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