Comment définir ce qui est bon ou mauvais ?

Discussion entre Socrate et Gloucon : 

(...) vous savez certainement que la majorité croit que le plaisir est le bien, tandis que les plus sophistiqués croient que c'est la connaissance.

En effet, c'est le cas.

Et vous savez que ceux qui croient cela ne peuvent pas nous dire de quel type de connaissance il s'agit, mais sont finalement obligés de dire qu'il s'agit de la connaissance du bien. Et c'est ridicule.

Bien sûr que c'est le cas.

Ils nous reprochent de ne pas connaître le bien, puis nous parlent comme si nous le connaissions. Ils disent que c'est la connaissance du bien, comme si nous comprenions de quoi ils parlent quand ils prononcent le mot "bien".

C'est tout à fait vrai.

Qu'en est-il de ceux qui définissent le bien comme un plaisir ? Sont-ils moins dans la confusion que les autres ? Ne sont-ils pas eux aussi obligés d'admettre qu'il existe de mauvais plaisirs ?

Très certainement.

Je pense donc qu'ils doivent être d'accord sur le fait que les mêmes choses sont à la fois bonnes et mauvaises. N'est-ce pas vrai ?

Bien sûr.

On comprend alors, n'est-ce pas, pourquoi il existe de nombreuses et importantes controverses à ce sujet ? Comment pourrait-il en être autrement ? Et n'est-ce pas clair aussi ? Dans le cas des choses justes et belles, de nombreuses personnes se contentent de ce qu'elles croient être ainsi, même si ce n'est pas vraiment le cas, et elles agissent, acquièrent et forment leurs propres croyances sur cette base. Cependant, personne ne se contente d'acquérir des choses que l'on croit simplement bonnes, mais tout le monde veut les choses qui sont vraiment bonnes et dédaigne la simple croyance dans ce domaine.

C'est exact.

Toute âme poursuit le bien et fait tout ce qu'elle fait pour lui. Elle sait que le bien est quelque chose, mais elle est perplexe et n'arrive pas à le saisir de manière adéquate ou à acquérir le type de croyances stables qu'elle a sur d'autres choses, et elle manque donc le bénéfice, s'il y en a un, que même ces autres choses peuvent apporter.

(…)

Mais, Socrate, tu dois aussi nous dire si tu considères que le bien est la connaissance, le plaisir ou quelque chose d'autre.

Quel homme ! Il est clair depuis un certain temps que les opinions des autres sur ces questions ne vous satisferaient pas.

Socrate, il ne me semble pas normal que tu acceptes d'exprimer les convictions des autres mais pas les tiennes, surtout quand tu as passé tant de temps à t'occuper de ces questions.

Qu'est-ce que c'est ? Pensez-vous qu'il soit juste de parler de choses que l'on ne connaît pas comme si on les connaissait ?

Ce n'est pas comme si on les connaissait, a-t-il dit, mais on devrait être prêt à exprimer ses opinions en tant que telles.

N'avez-vous pas remarqué que les opinions sans connaissance sont des choses honteuses et laides ? Les meilleurs d'entre eux sont aveugles - ou pensez-vous que ceux qui expriment une véritable opinion sans comprendre sont différents des aveugles qui se trouvent être sur la bonne route ?

Ils ne sont pas différents.

Voulez-vous donc regarder des choses honteuses, aveugles et tordues, alors que vous pourriez entendre d'autres personnes des choses éclairantes et excellentes ?

Par Dieu, Socrate, dit Glaucon, ne nous abandonne pas alors que la fin est presque en vue. Nous serons satisfaits si tu discutes du bien comme tu as discuté de la justice, de la modération et du reste.

Cela, mon ami, dis-je, me satisferait aussi, mais je crains de ne pas être à la hauteur, de me déshonorer et d'avoir l'air ridicule en essayant. Abandonnons donc pour l'instant la recherche de ce qu'est le bien en soi, car même parvenir à mon propre point de vue à ce sujet est un sujet trop vaste pour la discussion que nous avons entamée.

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Photo par Matthew Feeney sur Unsplash